Christian Boltanski

Ойын-сауық

Christian Boltanski revient sur la création de l'oeuvre « Les habitants de l’hôtel de Saint-Aignan en 1939 », exposée au musée d'art et d'histoire du Judaïsme.
Film réalisé par Isabelle Filleul de Brohy à l'occasion de la restauration de l'œuvre en 2018.
Au 19ème siècle, comme nombre de bâtiments à la valeur patrimoniale oubliée du Marais, quartier alors très pauvre, l’hôtel de Saint-Aignan est découpé en multiples logements où viennent s’entasser de petits artisans, souvent de la confection et pour la plupart immigrés juifs d’Europe de l’Est. C’est cette mémoire, disparue sous le travail de restauration qu’a voulu perpétuer l’artiste Christian Boltanski, sollicité par Laurence Sigal pour créer une oeuvre pour le futur musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme (mahJ), avant son inauguration en 1998. A cette époque, l’artiste, né en 1944, ne se soucie guère de sa judéité, ne voulant croire qu’en la valeur universelle de l’art. Par provocation et humour, quand on lui parlait d’identité, il répondait qu’il était un artiste corse, région d’où est originaire sa mère. Laurence Sigal réagit en disant quelque chose comme : c’est peut-être aussi ça, être juif, posséder plusieurs identités. Avec ce projet, Boltanski se retrouve confronté à une part de lui-même, enfouie, qui hante sa création. L’oeuvre « Les Habitants de l’hôtel de Saint-Aignan en 1939 », née du travail de recherches sur les locataires, à l’orée la Seconde Guerre mondiale, de ce « bidonville » comme le qualifie Boltanski, s’est imposée d’elle-même.
Un monument mémoriel poignant par la simplicité et la subtilité de son dispositif. 80 feuilles collées de manière aléatoire sur le mur d’une courette exiguë que jusque là on ne pouvait découvrir que par les fenêtres du musée, accessible désormais aussi via la librairie. Un monument de papier qui se dégrade avec le temps, volontairement, pour contraindre ses responsables à l’entretenir et, par conséquent, à lutter contre l’oubli. On en est à la quatrième restauration-collage. Sur ces feuilles, peu de choses d’inscrit : un nom, un prénom, un lieu de naissance, un métier, une fonction, une date parfois que l’on devine liée aux drames de la guerre. Effectivement, ce sont des dates de convoi de déportation. Treize habitants ne reviendront pas des camps nazis. Rien n’est explicitement dit mais tout se comprend intuitivement. Le plus puissant peut-être dans cette oeuvre minimaliste et fragile, Boltanski l’explique dans le film. Il n’a pas voulu distinguer les juifs des non-juifs. Seuls indices : la consonance de certains noms, certains prénoms, des métiers peut-être mais on ne le sait pas. Aussi, il y a « peut-être parmi eux le concierge qui a dénoncé tout le monde », assène Boltanski dans un demi-sourire. Serein, à près de 75 ans, celui-ci ne craint plus de déclarer : « J’accepte maintenant l’étiquette d’artiste juif ». L’oeuvre du mahJ n’y est pas pour rien.
Extrait de l'article de Bernard Hasquenoph pour le site « Louvre pour tous ».
© 2018 - fondation Pro mahJ - mahJ - IFB Productions

Пікірлер: 2

  • @laurencepoletti3275
    @laurencepoletti32754 жыл бұрын

    Christian Boltanski est lumineux

  • @jacquesmedina4967
    @jacquesmedina49674 жыл бұрын

    très belle initiative

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